Camp d’été 2010, « Poursuivre la paix » à Ramallah et Jérusalem

Notre projet est né à grâce aux liens entre les communautés catholiques françaises et la Terre Sainte, en particulier avec les écoles chrétiennes au sein du « Réseau Barnabé », pour :

  • Animer un Camp d’été en français dans une école chrétienne de Ramallah
  • Découvrir Jérusalem et le monde juif, à travers la rencontre avec des Israéliens.
Première entrée
En route pour "Poursuivre la paix"

« Évite le mal, fais ce qui est bien, poursuis la paix, recherche-la. » (Psaume 33, 15). C’est à l’invitation de cette parole du psaume que notre groupe s’est mis en route : 7 hommes et 11 femmes, pour la plupart de 20 à 35 ans, animés par le désir de découvrir la Terre Sainte autrement, à travers la rencontre et le service de ceux qui y vivent. 7 sont étudiants (en anglais, histoire, économie, médecine…), 9 sont enseignants ou directeurs d’écoles. En France, tous ont l’expérience de l’encadrement de jeunes et participent à la vie de leur communauté chrétienne. La plupart viennent de Paris et de sa banlieue et représentent une grande diversité de milieux sociaux et d’origines culturelles. Certains ne se sont encore jamais rendus en Terre Sainte. Mais c’est l’heure de boucler les bagages : départ à 7 h 05.

Vendredi 9 juillet : il est 5 heures, le groupe s'éveille
Il est 5 heures et comme prévu nous nous retrouvons Terminal 1 de l’aéroport Roissy Charles-de-Gaule. Très vite, l’enthousiasme de vivre un tel voyage prend le pas sur la fatigue qui se lit encore sur les visages. Après une escale à Zurich, nous atterrissons à 13 h 30 à l’aéroport de Tel Aviv. Le temps d’effectuer le changement d’horaire, il est désormais 14 h 30, l’heure pour le groupe de rejoindre Jérusalem par taxi collectif. Les dix premiers montent dans un véhicule qui part immédiatement pendant que les cinq autres patientent. La raison ? Nous ne sommes que neuf à l’intérieur du véhicule. Les minutes passent, le temps pour Jean-François de nous éclairer davantage sur le contexte politique israélo-palestinien.
 Jérusalem ne constitue pour nous qu’une étape avant de rejoindre Ramallah. Loin de la vision de camp de réfugié ou de ville en guerre, Ramallah nous apparaît comme une étendue de constructions qui couvrent les collines, modernes et blanches, luxueuses par endroit. Nous sommes accueillis par Sireen et Ruba, professeurs de français à l’école grecque-melkite Notre-Dame de l’Annonciation. La directrice nous rejoint peu de temps après au home anglican de l’Evangelical Training and Vocational Center. Demain, nous rencontrerons les enfants avec qui nous travaillerons toute la semaine. Nous sommes impatients et voulons réussir notre entrée en matière ! Autour d’un repas où nous découvrons des spécialités locales, nous nous mettons rapidement au travail.
Samedi 10 juillet : Premier jour de camp
Nous sommes arrivés vers 8 h 30 à l’école Notre-Dame de l’Annonciation après 20 minutes de marche vêtus de nos T-shirts blancs avec prénom de chacun et drapeau français. Nous avons été accueillis par la directrice qui très vite nous a offert des polos gris marqués du signe de l’école et derrière du Réseau Barnabé, des casquettes blanches. Avec notre nouvelle tenue nous avons visité l’école et choisi les classes pour chaque atelier.Grand rassemblement dans la cour. Mot de la directrice en arabe au micro, prière à Marie en arabe (pendant ce temps là les Musulmans « prient dans leur cœur ») puis hymne national dans une attitude respectueuse. Notre groupe se présente avec un chant rythmé et gestué : « Si tu es heureux ce matin tape dans tes mains… » permettant à chacun de participer. Jean-François distribue à chacun son « passeport français » du Réseau Barnabé pour le camp d’été.
Nous passons à la répartition des ateliers, moment compliqué car les enfants étaient rangés par classe et pas par équipe. Nous donnons à chaque chef d’équipe les 4 coupons des ateliers numérotés selon le passage pour la journée. Les enfants, habillés avec des T-shirts décorés comme les nôtres, les petits (7-9 ans) en rouge et les grands (10-12 ans) en bleu, se lancent. L’atelier « Dire » a mis en place « Sardine et Crocodile » en répétant mots, bouts de phrases et la comptine entière, parlée puis chantée. Le succès a été tel qu’à la pause les autres groupes avaient les oreilles qui résonnaient du chant.
 Pendant ce temps, Jean-François et Béatrice installent un très grand panneau avec le nom de chaque équipe et les jours de la semaine pour que l’on puisse visualiser les quatre activités du jour. Puis ils font le tour de chaque groupe pour tamponner les passeports sur le nom de l’activité. Les enfants ont trouvé la bonne formule pour accélérer le mouvement : « finish, finish, tampon, tampon ! ». Un oubli : ils ne doivent parler qu’en français !
L’après-midi, les enfants font deux autres ateliers. Nous remarquons qu’ils deviennent de plus en plus à l’aise — et même que certains n’ont pas peur de nous tenir tête ! Vers 16 h les parents viennent chercher leurs enfants heureux, brandissant leur passeport, et prêts à revenir. La journée a été ponctuée par des rencontres profondes. Un des professeurs de Français, Nahed, explique à sœur Béatrice sa passion du français et de la France qui véhicule une culture qui prend en compte le tout de l’homme, un art de vivre et une manière d’exprimer finement sa pensée. La directrice et son assistante racontent qu’elles sont toutes deux de Ramallah et ont vu son évolution avec le passage d’une ville prospère à une région emmurée. Elles ajoutent que le nombre de chrétiens ne cesse de diminuer. Nous prenons conscience que dans l’école elles tiennent à maintenir une entente et un respect entre les chrétiens et les autres. Un exemple : alors que les élèves chrétiens pourraient plus facilement que les musulmans obtenir une autorisation pour aller à Jérusalem, l’école préfère renoncer à un tel projet avec une partie seulement des élèves.
 
Après le départ des enfants, certains d’entre nous restent travailler sur place et d’autres reviennent reprendre des forces. Nous nous retrouvons tous à 18 h dans une grande pièce aménagée en oratoire pour une prière commune : les actions de grâce orientent notre attitude et notre cœur pour les jours palestiniens. Puis nous nous retrouvons pour un bon moment où nous échangeons sur les expériences de la journée, les points à améliorer et les grandes lignes de la semaine à venir (invitation, messe, planning de la journée, sans oublier l’événement du 12 juillet : le finale Espagne Pays-Bas. Le groupe est fortement influencée par un certain Benoît, pas seulement gargeois et la ferveur des Palestiniens pour l’équipe espagnole ! Une nuit bien méritée nous attend… C’est demain dimanche le petit-déjeuner ne sera qu’à 8 h 30 !
(Béatrice et Alice)
Dimanche 11 juillet : en familles

 

Après la messe paroissiale à l’église grecque melkite, dans la cour de l’école, nous rencontrons des familles — pour la plupart, parents d’élèves — dans lesquelles nous nous dispersons pour partager le repas dominical. « Si l’on devait résumer avec des mots la journée ce serait : « Amour » pour l’amour que Dieu nous porte et nous demande de transmettre à notre prochain ; « espérance » pour le peuple palestinien qui, malgré la situation, croit en la liberté et l’amélioration de sa condition ; « générosité, accueil, hospitalité » dont ont fait preuve les habitants de Ramallah depuis notre arrivée et plus encore aujourd’hui pour le repas dominical que nous avons pris dans les familles ; « émotion » lors de ma visite au mausolée de Yasser Arafat et en retrouvant notre groupe avec nos différents témoignages. Être là, parmi les gens qui vivent ici, pour poursuivre la paix… »
(Nadine)

 

 

Lundi 12 juillet : Rythme de croisière

 

Aujourd’hui, journée ordinaire. Nous sommes à l’école pour nos ateliers. Cependant avec Alexandra, chargées de l’atelier « écrire », nous avons une bonne surprise ! Nous avons en effet un groupe de tout petits (6 ans) et ils ne sont que trois aujourd’hui. Du coup, on leur fait faire plein de choses : calligraphier leurs prénoms, écrire des mots du quotidien : maison, ballon, fleur… Ils apprennent très vite, écrire en « lié » n’est pour eux pas quelque chose d’habituel. C’est super de se sentir utile ! Notre journée commence à merveille et cela nous donne la pêche pour le reste des activités !
(Victoire)

 

 

Mardi 13 juillet : Culture locale

 

La journée s’est déroulée de façon ordinaire pour le fonctionnement des ateliers. Nous commençons à nous accoutumer aux enfants et la communication est de plus en plus facile : le dialogue se fait en français et ils écoutent très patiemment bien que certains mots leur échappent. Nous apprenons également à connaitre les animateurs palestiniens qui nous ont tous conviés au restaurant pour le diner, où nous avons fêté les anniversaires de Benoit et François. La culture locale nous est de plus en plus familière même si quelques aspects continuent à nous surprendre ; la condition des femmes est très difficile dans la religion musulmane et au Moyen-Orient en général. Une conversation que nous avons eue au diner avec une animatrice de 15 ans nous a aidés à mesurer la différence : étant musulmane, toutes ses amies sont des filles, elle ne sort jamais après 10 heures et sait qu’elle sera considérée comme mineure par ses parents jusqu’à son mariage ; son mari deviendra alors son tuteur. Si sa mère reconnait cet état de fait comme injuste, celle-ci n’osera jamais en faire part à son mari. « Bienvenue au Moyen-Orient ! » nous dit-elle. Elle envisage depuis longtemps de venir faire ses études en Europe après son baccalauréat. Notre présence à Ramallah semble l’avoir confortée dans cette idée.
(Aliénor)

 

 

Mercredi 14 juillet 2010 : Fête de la France

Une journée sous le signe de la Fête nationale : nous troquons notre polo gris pour un tee-shirt au couleur de la France, nous chantons l’hymne nationale à la suite de la prière et de l’hymne palestinien. La matinée s’enfile avec les ateliers quotidiens, mais l’après-midi, surprise ! Nous voilà partis pour une série d’épreuves afin de remporter le Tour de France : Paris, Besançon, Lyon, Marseille, Nantes. Il s’agit de reconnaître les aliments au goût, de chambouler la Tour Eiffel, de répondre au quizz sur la France, de pratiquer des jeux d’adresses en annonçant en français ce que l’on fait, de chanter… Les enfants courent d’épreuve en épreuve dans la joie et l’enthousiasme. Ils développent ainsi leurs qualités tels que la persévérance, la patience, l’humilité (savoir accepter de perdre), les connaissances, la rapidité… Tout le monde est arrivé bien épuisé à la fin de la journée, mais heureux !
Malgré tout, nous voilà pourtant repartis en direction de Jérusalem pour la Garden party au Consulat général de France. Changement de décor assez saisissant entre petits-fours et discours. Rencontres multiples avec des personnalités juives, les autorités ecclésiastiques, les coopérants… Cela nous a permis de réaliser un peu mieux le rôle important que remplie le Consulat général de France à Jérusalem. Nous sommes ensuite repartis en car vers Ramallah, passant de nouveau le mur, sans contrôle particulier.

Jeudi 15 juillet : Vivre à Ramallah

 

Jeudi soir, après une journée animée à l’école, nous sommes de nouveau accueillis dans les familles des enfants. Les rencontrer dans leur espace privé est d’une grande richesse. Dans une famille, une maman nous a confié que vivre à Ramallah est un défi pour elle, son mari et ses enfants, quand tant de Palestiniens quittent leur pays. Elle pense que la paix, malgré les incompréhensions mutuelles, sera possible non pas pour sa génération mais pour la génération suivante. Dans chaque famille, les gestes d’accueil, de partage et de dons nous touchent profondément.
(Alice et Anne-Marie)

 

 

Vendredi 16 juillet : Belle conclusion de notre semaine avec les enfants
Après une journée consacrée aux derniers préparatifs du spectacle, à 18 h 30 les familles arrivent et à 19 h les enfants entrent en scène. La directrice introduit la soirée, suivie de Jean-François et d’une des élèves de l’école qui avait préparé un discours en français pour l’occasion.
Ce fut extraordinaire et touchant de voir à quel point les enfants étaient heureux de présenter à leurs parents tout ce qu’ils avaient appris durant la semaine dans les différents ateliers. Des écritures calligraphiées en passant par une démonstration d’exercices sportifs, des danses ou du théâtre aux exercices de langue. Les parents étaient fiers et impressionnés par le travail accompli par leurs enfants. Après leur avoir offert en récompense une mini Tour Eiffel souvenir, la soirée s’est terminée joyeusement autour d’un buffet préparé par les familles.
Samedi 17 juillet : Dernière journée de camp

C’est une cour d’école baignée de soleil. Ca ressemble à un centre aéré avec des plus grands qui jouent avec des plus petits. C’est notre dernier jour à Ramallah, et nous ne passerons avec les enfants que la matinée. Nous sommes fatigues et heureux, le cœur tout prêt à la contemplation de ces enfants dont nous nous souviendrons les sourires comme les frustrations. À midi, la directrice, madame Naela nous a prévu un repas d’au revoir. Le dessert est excellent. C’est un gâteau arabe de Naplouse où nous irons demain. François a de la chance : c’est son anniversaire.
Le soir, nos amies Nahed, Ruba et Sireen nous emmènent dans un restaurant ou travaille le frère de Sireen. C’est un lieu très agréable où nous discutons bien. Nous sommes tristes de les quitter ainsi que tous ceux qui nous ont élargi le cœur par leur hospitalité à Ramallah. J’ai une belle conversation avec Nahed, l’une des trois profs de français qui nous ont accompagnés auprès des enfants. J’en parle ici car c’est la seule musulmane avec qui j’aurai parlé pendant ce voyage. Rien ne la distingue, et je l’ai d’abord crue chrétienne. Comme elle m’interroge sur la littérature qui circule en Europe sur la Palestine, je ne peux lui citer que quelques films. Puis je lui dis que j’ai lu l’Évangile avant de venir. Elle me dit alors qu’elle a aussi l’Évangile chez elle, alors qu’elle est musulmane. Elle a pu entendre combien les gens de Ramallah ont été bons pour nous et cela me réjouit. Demain nous irons dans sa ville à Naplouse.
Mais pour l’heure, il faut profiter de la piscine qui nous invite à un bain de nuit au fond du restaurant. Nous nous baptisons tous les uns les autres par triple immersion en commençant par Julie ! Pendant ce temps, le patron qui est sympa passe en boucle une chanson de Brel…

(Antoine)
Dimanche 18 juillet : Naplouse, Ramallah, et finalement... Jérusalem
C’était le pari : après une semaine d’animation d’un camp
d’été en français à Ramallah et de formidables rencontres, nous avons choisi de demeurer une semaine à Jérusalem, pour prendre le temps de la prière, de la rencontre, de la découverte de l’histoire et des communautés… Une invitation à l’intercession.

Le bus nous attends depuis 8 heures moins dix et nous quittons péniblement Ramallah à 8 heures vingt. Il faut dire que nous avons dû faire nos bagages dans une nuit de six heures de sommeil. Cela nous fait du bien de voir un peu de pays si bien introduit Jean-François. Nous quittons la zone urbaine de Ramallah à Bir Zeit, ou se trouve une belle université. Nous sommes passés entre temps devant un mausolée à Yasser Arafat. Ramallah fut aussi sa ville de l’amour puisqu’il y a épousé une chrétienne d’une grande famille.

Une fois passé le check point, c’est une campagne magnifique jusqu’à la zone urbaine et palestinienne de Naplouse. Je ne compte que deux villages, alors que nous parcourons beaucoup de terre. Nos amies nous diront plus tard que les Palestiniens n’ont pas le droit de s’y installer. Partout des terrasses et des oliviers. Comme sur les pentes du Ventoux on se demande : qui a fait ce travail titanesque de ramasser puis d’empiler ces pierres ?
 
Nous passons près des sanctuaires de Sichem et Silo, mais tout le monde roupille. Il s’est passé beaucoup de choses à Naplouse. L’histoire de son nom qui commence comme celui de Naples nous la rend familière. Ce fut la capitale du royaume d’Israël, celui du Nord. Nous nous recueillons sur le puits de Jacob avec la Samaritaine, puis nous allons vite à la messe latine. Le prêtre nous salue en français, il semble que tout le clergé « latin » en Orient soit francophone. Pendant l’homélie, il parle tant avec les mains et avec sympathie qu’il nous semble comprendre l’arabe. La quinzaine de paroissiens nous invite dans une salle à côté pour boire le café arabe. Les chrétiens quittent Naplouse. Ils étaient plusieurs milliers il y a vingt ans, ils sont six cents aujourd’hui. Ceux qui nous accueillent sont âgés, dignes et beaux.

Naplouse est la plus grande ville du Nord de la Cisjordanie. Elle compte 340 000 habitants. Nous allons visiter avec nos amies la vielle ville et le souk. C’est un peu difficile car si les gens nous disent qu’ils aiment Chirac, nous sentons aussi des regards hostiles. Un guide très stressé essaye de s’imposer à nous alors que nous n’en voulons pas. Mais nos amis viennent tellement rarement qu’elles lui demandent notre chemin. Cette visite nous servira à mieux comprendre Jérusalem comme une ville orientale, arabe et aussi musulmane. Enfin nous allons déjeuner avec nos amies dans un parc agréable et paisible où elles viennent souvent elles-mêmes. Diana nous soigne et nous mangeons très bien !

 
 Sur la route du retour, je vois une arme de guerre braquée sur moi pour la première fois. Je comprends alors à quoi servent les rideaux dans les bus ! Le soir nous sommes dans la ville sainte, et nous contemplons la Jérusalem terrestre.
(Antoine)
Lundi 19 juillet : Découverte de Jérusalem

Au Musée de la citadelle, puis Tisha B’Av au Kotel, Rencontre avec Émile MOATTI, Rencontre avec Hana BENDCOWSKY

Mardi 20 juillet : le Saint-Sépulcre

Très tôt, dès l’aube, nous avons gravi les innombrables marches de Jérusalem vers le Golgotha et le tombeau du Christ. La ville était à peine réveillée, les portes des échoppes fermées et les rues vides ; presque le silence. Un silence bien inhabituel dans le brouhaha de la veille et quotidien de la ville : nos pas fermes au rythme de notre cœur battaient alors le pavé comme le tambour qui annonce la nouvelle, la Bonne Nouvelle. Nos âmes étaient à la fois sereines mais nos cœurs fébriles, impatients de rencontrer ce lieu saint tant évoqué lors de nos offices hebdomadaires et nos lectures de la Bible. Le Seigneur, ici, est venu, est mort et a ressuscité ! Alléluia !

 
Mais, le spectacle fut surprenant, déroutant ! La basilique aux allures surannées, épurée de l’extérieur offrait à l’intérieur splendeur et dénuement : splendeur dans les dorures et les icônes de la crucifixion du Christ, dénuement pour ce tombeau, humble sépulcre. Le Saint-Sépulcre au cœur de la basilique semblait tellement modeste, fragile car tenu par des échafaudages, qu’au lieu de joie et d’exultation, je ne pouvais éprouver que tristesse face à l’image de ce Christ dépouillé, faute de concorde des hommes et des Églises.
 
Dans ces ténèbres, je fermais les yeux et dans la prière, dans la ferveur de la foi des pèlerins en la Résurrection du Christ, je compris peut être le sens de cette sainte image, icône vivante de notre Église… « Dans nos obscurités, allume le feu qui ne s’éteint jamais ».
(Patrick P.)
Mercredi 21 juillet : Yad Vashem

Au mémorial de Yad Vashem, nous avons rencontré Shlomo Balsam, qui consacre sa retraite de professeur à redonner vie à des photos et des images de la shoah. À travers ses récits émailles d’anecdotes et de souvenirs personnels, il nous a touchés, émus, captivés. Un message d’espérance nous a particulièrement rejoints : après la shoah, les juifs se sont lancés dans la vie, « La plus grande vengeance que l’on peut avoir de la mort, c’est de donner la vie ».

Jeudi 22 juillet : Esplanade des Mosquées, Bar-Mtisva au Kotel...

Ce matin, nous débutons notre journée par une messe célébrée par Mgr Joseph-Jules Zerey chez les Sœurs de Charles de Foucauld. Très belle liturgie qui nous conduit vers la Jérusalem céleste… Retour sur terre cependant dans le courant de la matinée. Après la visite de l’Esplanade des Mosquées, nous nous acheminons vers le Kotel pour assister aux nombreuses Bar-Mitsva qui y ont lieu tous les lundi et jeudi. Foule « endimanchée », venue du monde entier, véritable liesse après le deuil du 9 du mois d’Av. C’est un vrai changement de décor. Du côté des femmes, nous assistons à la fête en nous hissant sur des chaises pour passer au-dessus de la barrière qui séparent hommes et femmes au Kotel. De magnifiques Torah sortent en procession des armoires. Et, après lecture du passage choisi et préparé par le jeune, c’est un déchaînement de joie : danses, chants, bonbons lancés par les femmes…

Nous sommes ensuite invités à déjeuner au Patriarcat melkite par Mgr Zerey. Nouveaux échanges passionnants avec cet homme de Dieu si généreux de son temps et de son sourire. Nous finissons enfin la journée par une nouvelle rencontre avec le père Rossi de Gasperis, jésuite. Cet homme, présent à Jérusalem depuis 35 ans, s’applique à nous introduire à une lecture de foi de la situation d’Israël aujourd’hui… : lumineux et très profond !
(Alexandra)

Pour une lecture biblique de la situation
Synthèse de l’intervention de Francesco ROSSI de GASPERIS, sj

On parle de paix depuis 35 ans mais sans faire le nécessaire pour cela. Des sociologues, politiciens, spécialistes divers s’intéressent à la situation mais ce qui nous manque le plus est une lecture biblique de la situation. Pourquoi ne veut-on pas apprendre de la Parole de Dieu et comment le faire ? Israël est-il toujours le peuple choisi ? Paul le dit : les choix de Dieu sont irrévocables, parce que Dieu est un, fidèle à ses choix comme à lui-même. Mieux que dans nos pays, on peut comprendre ici que le plan de Dieu se déroule dans l’histoire. Le christianisme n’est pas une doctrine mais d’abord une histoire. Une histoire, c’est une suite de faits, chacun préparant le suivant. Parler de figures renvoie à une typologie hellénistique. Comme le moule d’un bronze que l’on casse après la coulée, la figure disparaît. Au contraire, ici, les faits s’enchaînent. Et il n’y a pas d’histoire sans géographie. La Bible elle-même ne cesse d’évoquer des lieux que nous connaissons. La Parole nous est donnée dans une terre particulière que nous pouvons découvrir pour contempler la globalité et l’harmonie du plan de Dieu dans un lieu et dans l’histoire.

L’histoire d’Israël et l’histoire de l’Église — c’est la même chose — connaissent des moments critiques, des tragédies comme l’Exil et la destruction du Temple. Ce que nous connaissons aujourd’hui est très lourd mais nous avons déjà connu des situations dures dans l’histoire. Elles devraient nous aider à découvrir les faux-pas et les voies de solution. C’était avant-hier Tisha be Av qui commémore la destruction du premier temple ainsi que les autres catastrophes : expulsion des juifs d’Espagne, Shoa, etc. Un rabbin nous disait : nous sommes assis comme autour d’un grand vide parce que le temple n’existe pas et nous prions Dieu de nous redonner le temple. Chrétiens, nous sommes d’une certaine façon nous aussi autour d’un grand vide : le tombeau. Une certaine absence de Dieu nous réunit. Les grecs préfèrent appeler le Saint-Sépulcre Anastasis (« Résurrection »), ce qui nous dit pourquoi le tombeau est vide : nous ne sommes pas à la situation antérieure. La résurrection nous dit que nous ne mourrons pas. Ce que nous attendons n’est pas la répétition du passé mais une promotion, une marche en avant. L’État d’Israël pouvait être une ouverture pour l’humanité, l’œuvre de la nation sacerdotale qui fait connaître le nom de Dieu à tous. Mais nous en constatons aujourd’hui le risque : l’idée que le bien d’Israël serait le retour à une situation antérieure, une restauration. Cela peut être dû à l’évolution rabbinique — qui a figé le judaïsme pour pouvoir le conserver — mais aussi à la conjoncture internationale. Le fait que des juifs projettent de reconstruire le troisième temple est symptomatique de ce retour en arrière. Cela n’est pas le plan de Dieu. On l’a découvert dès le retour d’Exil en chantant Dieu à la synagogue. Dieu a bien dit qu’il ne voulait pas le temple, pas plus que la royauté qui ne se maintiendra que quatre siècles. Pourquoi alors un tel attachement au temple, sinon par attachement à l’œuvre de ses mains ? Les chrétiens savent que le temple aujourd’hui, c’est le Christ. C’est de son corps qu’il parlait lorsqu’il annonçait le redressement du temple après trois jours.

Beaucoup de gens voient clair aujourd’hui en Israël, mais sans parvenir à s’affirmer politiquement. Lors des élections, les votes se portent à droite… ou à l’extrême droite. Comme les Israéliens, les Arabes ont perdu 20 ans. Après la guerre des six jours en 1967, c’était le moment de faire la paix entre tendance modérées de part et d’autres. Les implantations, ou colonies, ont peu à peu dégradé la situation jusqu’à l’inextricable. Mais le Seigneur est là ! Nous devons maintenir une lecture de foi, forts de la connaissance des invasions des grands empires assyriens, babyloniens, perses ou romains, ou dans l’Église, les schismes et divisions. La proposition de Jean-Paul II aux autres Églises de discuter de ce qui leur posait problème dans la primauté de Pierre est encore restée sans réponse. Et au-delà de la foi, il y a ce que nous faisons, qui compte encore davantage.

Nous devons seulement abandonner l’idée que nous détenons la solution parce que c’est une arrogance. Mais nous devons travailler peu à peu au plan de Dieu : faire d’Israël le sacrement, signe efficace du salut de Dieu pour toutes les nations. Tout ce qui ne favorise pas seulement le dialogue mais l’espérance d’une solution juste est nécessaire. Plus de 500 familles de tous bords qui avaient perdus certains de leurs membres et ont décidés de travailler à la réconciliation… Une femme israélienne disait : vous, chrétiens, vous dites que nous sommes tous enfants de Dieu alors que j’ai été éduquée dans l’idée que seuls les juifs l’étaient ; c’est la douleur de l’autre et son espérance qui m’a fait reconnaître cette même humanité chez les arabes. Le dialogue interreligieux devrait être fondé sur l’espérance. Tu es humain comme moi ; qu’est-ce que tu espères de la vie, de la mort, du sens de la vie ? Ce qui fait souffrir est moins la douleur que l’absence de sens. Le sens de notre vie, c’est ce que nous faisons de notre amour, de notre travail, de notre vie, de notre prière. Mon espérance n’est pas le tombeau vide mais la résurrection de Jésus. Je vénère le tombeau parce qu’il me rappelle cette résurrection et que Jésus est maintenant partout.

Nous bâtissons notre résurrection. En effet, seul l’amour ressuscite. C’est pourquoi le tombeau est vide : tout a été brûlé dans l’amour.

Vendredi 23 juillet : Du chemin de Croix au repos du Sabbat

Le sixième jour de la semaine est, selon la pensée rabbinique, le jour du péché de l’homme. C’est pour nous Chrétiens le jour où le Christ s’est offert pour racheter notre péché. C’est au sommet du Mont des Oliviers que commence notre journée, entre désert de Judée et collines de Jérusalem, entre la mort et la vie, pour suivre le chemin de souffrance qui a été celui du Christ il y a 2000 ans.

Dans la descente vers Gethsémani, le long de la vallée du Cédron, les milliers de tombes juives qui font face au cimetière musulman au pied de la vieille ville nous rappellent l’espérance que porte cette Terre malgré le sang qui y a été versé. C’est ici que, selon la tradition, le Messie attendu par les Juifs doit venir. Le long du chemin qu’a vraisemblablement suivi Jésus pour remonter vers les maisons des notables de Jérusalem et de Pilate, les lieux de prière (Saint-Pierre-en-Gallicante, le Cénacle …) témoignent du passage de millions de pèlerins qui nous ont précédés et qui sont venus prolonger cette espérance dans la foi en la résurrection du Christ.

Mais au fur et à mesure que le sixième jour avance, on se rapproche du septième jour, le jour du repos de Dieu, que les Juifs pratiquants consacrent à la prière et à l’étude. Le Sabbat commence avec l’apparition de la première étoile dans le ciel et des familles juives ont accepté de nous inviter pour ce repas du vendredi soir qui inaugure un moment à part dans le temps, où l’on prend ce repos nécessaire à mieux entrer dans la joie du Seigneur.

Chez Myriam et Samuel, les rites nous sont détaillés et expliqués. Nous sommes enseignés, puis nous chantons ensemble et, à la demande de nos hôtes, nos chants chrétiens viennent relayer les chants de la liturgie juive. Les questions se succèdent et se répondent avec une grande soif de découvrir l’autre. La compréhension mutuelle n’est pourtant pas si aisée. Il parait difficile, sans être soi-même juif, d’entrer dans cet élan du peuple d’Israël vers la fin des temps qu’annonce le retour en Terre promise des Juifs du monde entier, comme nous l’affirment nos hôtes.

Une question nous brûle les lèvres : « Quelle peut-être alors notre place et notre rôle comme Chrétiens dans la réalisation de cet élan du peuple choisi ? ». Émue — « c’est une si belle question » nous dit Samuel —, c’est Myriam qui nous répond : « Témoignez chez vous de ce que vous avez vu, témoignez de la lumière d’Israël ! ».
(Nicolas)

Samedi 24 juillet : Bethléem

Après la visite de la basilique de la Nativité et le repas avec Fatima, professeur de français à Beit Sahour, nous nous rendons au Collège des Frères. Nous sommes invités au spectacle de fin de session d’été en français organisé par les animateurs de l’association Enfant de Terre Sainte. Nous terminons la semaine au restaurant avec eux, le directeur et les professeurs de français du Collège des Frères.

Dimanche 25 juillet : Saint-Etienne, École biblique et archéologique française de Jérusalem

Messe à la basilique Saint-Etienne de l’école biblique française et repas festif. Repos l’après-midi à Jérusalem.

Lundi 26 juillet : Abu Gosh

Sur la route du retour vers l’aéroport, nous rencontrons le frère Olivier à l’abbaye d’Abu Gosh. Il nous parle de ses liens avec les jeunes Israéliens qu’il rencontre dans le cadre du programme de formation de l’armée au cours du service militaire.

En guise de conclusion de l’expérience… faire un pas au milieu
Nous avons fait l’expérience de l’amitié et de la solidarité avec toutes les personnes rencontrées, et nous nous sommes sentis écartelés comme Jésus sur la croix. Telle est la véritable prière chrétienne d’intercession :

« Intercéder ne veut pas seulement dire « prier pour quelqu’un », comme on le pense souvent. Étymologiquement. Cela signifie « faire un pas au milieu », faire un pas de manière à se mettre au milieu d’une situation. L’intercession veut dire alors se mettre là où le conflit a lieu, se mettre entre les deux camps en conflit. Il ne s’agit donc pas seulement d’exprimer un besoin devant Dieu (Seigneur, donne-nous la paix !), en restant à l’abri. Il s’agit de se mettre au milieu. Ce n’est pas non plus assumer simplement la fonction d’arbitre ou de médiateur, cherchant à convaincre l’un des deux qu’il a tort et qu’il doit céder, ni d’inviter l’un et l’autre à faire quelque concession réciproque, à aboutir à un compromis. On resterait encore dans le champ de la politique et de ses maigres ressources. Celui qui se comporte ainsi demeure étranger au conflit, peut s’en aller à tout moment, en se lamentant peut-être de n’avoir pas été entendu. Intercéder est une attitude beaucoup plus sérieuse, grave et qui engage, c’est quelque chose de beaucoup plus dangereux. Intercéder c’est être là, sans bouger, sans issue, cherchant à mettre la main sur l’épaule des deux adversaires en acceptant le risque de cette position. […]

On ne peut jamais mettre sur le même plan les assassins et les victimes, les transgresseurs de la loi et ses défenseurs. Mais, quand je regarde les personnes, aucune ne m’est indifférente, je n’éprouve de haine pour aucune et je ne hasarde pas de jugement intérieur ; je ne choisis pas non plus de me mettre du côté de celui qui souffre ou de maudire celui qui le fait souffrir. Jésus ne maudit pas ceux qui le crucifient, mais il meurt pour eux, en disant : « Père, pardonne-leur, ils ne savent ce qu’ils font » (Lc 23, 34). Si ma prière n’atteint pas cette double solidarité, si j’intercède pour que le Seigneur secoure l’un et abatte l’autre, si j’ignore encore le besoin de salut de celui qui a éventuellement tort, de celui qui a choisi contre Dieu et contre son frère, si je l’abandonne et ne lui mets pas la main sur l’épaule, ma prière n’est pas une prière d’intercession. »

(Cardinal Carlo Maria MARTINI, Vers Jérusalem, « Un cri d’intercession », Cerf, Paris, 2004)

Une rentrée en chanson

Une rentrée en chanson

C’est aujourd’hui la rentrée des classes pour les élèves des écoles de Terre Sainte ! Bon courage…

Mon pays…

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